Media image full width

Préférer les aliments frais aux boîtes Tendance «de la ferme à la table»: qu’en pensent les restaurateurs?
Par Simone Maria Knittel
Tôt le matin, la carotte est encore dans la terre fraîche. Le soir même, elle ravit les papilles des gourmets. Le concept «de la ferme à la table» dans la restauration semble simple: les légumes et la viande passent directement de la ferme à la cuisine. Les agriculteurs, les cuisiniers et surtout les clients, tous tirent profit des circuits courts et des produits frais. Mais si cette tendance semble idyllique, elle représente aussi un défi de taille pour la restauration. Sebastian Funck, restaurateur zurichois et gérant du restaurant Wirtschaft im FranzTarget not accessible, nous donne un aperçu de sa façon de mettre en œuvre le concept «de la ferme à la table» en milieu urbain.
L’Appenzell plutôt que la France
La carte automnale du Wirtschaft im Franz parle d’elle-même: les notions de saison et de région y sont omniprésentes. En entrée on trouve, par exemple, du céleri aux noix ou du chou-fleur râpé aux champignons grillés. Si vous commandez un plat principal, vous pourrez déguster du cerf au chou rouge ou du foie de canard à la confiture de quetsches. Du foie de canard? «Le foie provient de canards de la région d’Appenzell», explique Sebastian Funck au sujet de son menu. Mais les canards du canton d’Appenzell peuvent-ils encore être considérés comme des produits régionaux? «Bon nombre de nos produits sont issus de fermes de Zurich ou des environs. Nous nous procurons certains produits directement, d’autres via des intermédiaires.»
Au plus près des producteurs
Bien entendu, il existe à Zurich des restaurants qui mettent en œuvre le concept «de la ferme à la table» de manière encore plus radicale. À l’image d’un célèbre restaurateur, qui ne propose jamais de menu: il se laisse guider presque uniquement par l’offre des producteurs locaux et sert parfois le soir un menu entièrement à base de porc, selon le principe «Nose-to-Tail» (du museau à la queue). Sebastian Funck admire cette façon de travailler, mais cette approche ne séduirait toutefois pas sa clientèle: «Certains clients ne sont tout simplement pas assez ouverts car ils sont habitués aux morceaux nobles de l’animal.» Le concept «Nose-to-Tail» requiert une certaine compréhension de la part de la clientèle: certains se voient servir des côtelettes ou de la poitrine, d’autres du museau ou du lard. Cette approche serait toutefois bien plus durable.
Si le «Nose-to-Tail» n’est pas une priorité absolue au Wirtschaft im Franz, Sebastian Funck trouve d’autres moyens pour instaurer le concept de durabilité dans sa cuisine: il achète toujours les morceaux de viande non conventionnels et renonce aux morceaux nobles du bœuf et autres animaux. On le sent bien: l’estime portée aux produits est pour lui primordiale. Ayant grandi à la campagne, il a lui-même déjà assisté à l’abattage de cochons. Ce souvenir l’accompagne encore lorsqu’il travaille la viande. Cela ne l’a pas choqué, mais plutôt marqué et il a ainsi appris à traiter la viande avec respect.
Au Wirtschaft im Franz, la durabilité se reflète aussi dans le travail d’équipe. La brigade est avide de nouvelles connaissances et se pose toujours de nouveaux défis. Il est parfois arrivé, à l’occasion de sorties d’entreprise, que les truites servies dans le menu du soir aient été directement prélevées dans l’étang d’élevage par les cuisiniers. En outre, l’équipe a ainsi pu rencontrer la famille qui élève les poissons. «Cela permet de considérer et de traiter le produit de manière totalement différente», selon Sebastian Funck. «C’est pourquoi il est aussi très important pour nous d’entretenir une bonne relation avec nos producteurs et nos fournisseurs.»
Cuisiniers proches des clients
L’équipe du Wirtschaft im Franz ne souhaite pas se rapprocher de ses producteurs uniquement. Au restaurant aussi, le contact personnel est une priorité. L’époque où les cuisiniers travaillaient enfermés dans un sous-sol sans fenêtre est révolue. Au lieu de ça, la cuisine se trouve aujourd’hui directement dans la salle du restaurant. Attablés, les convives entendent les sifflements et les grésillements de la cuisson, et peuvent assister à la préparation de leur plat. «De nos jours, les clients sont beaucoup plus curieux», explique Sebastian Funck, «ils posent plus de questions qu’avant et montrent de l’intérêt pour les plats.»
Un champ attenant au restaurant
Sebastian Funck est réaliste à l’égard du concept «de la ferme à la table»: «Nous nous donnons du mal pour inspirer et enthousiasmer nos hôtes. Mais certains viennent simplement pour se faire plaisir et les discussions tournant autour des saisons ou du gaspillage alimentaire ne les intéressent pas.» Il sait se montrer compréhensif. «Je trouve toutefois cela dommage qu’aujourd’hui encore, et malgré toutes les discussions sur le sujet, la sensibilité aux produits frais, équitables et de saison ne soit pas toujours donnée à tout le monde», ajoute Sebastian Funck. Pour conclure, nous avons demandé à Sebastian Funck quel serait le restaurant idéal. «De la ferme à la table!», répond-il immédiatement, «un restaurant à la campagne avec un terrain pour faire pousser nos propres légumes, mettre de temps à autres les mains dans la terre et récolter nous-mêmes les carottes. Ce serait top!»